01déc. 2010
La grande histoire des guitares Lag
23:41 - Par bpier - Guitares - 13 commentaires
Lâg, la marque de guitare française la plus vendue au monde. La société fondée par Michel Chavarria fut longtemps installée dans mon département, à Bédarieux (dans l'Hérault), après avoir commencé sa production à Toulouse. Désormais, elle a rejoint Nantes où se trouve le siège social d'Algam, le groupe qui l'a rachetée. Michel n'a pas suivi le transfert. Toutes les images présentées ici ont été prises quand l'atelier était encore installé à Bédarieux, donc avant sa fermeture définitive, avec Michel à la tête de la société. Ces images retracent ainsi les grandes années de Lag.
Billet mis à jour le 29 mai 2021Catalogue_Lag_1998.pdf
De Toulouse à Bédarieux
Michel Chavarria a démarré en 1978, dans l'atelier qu'occupait son grand-père, maître artisan tapissier. De réparations en réglages, et sa réputation grandissant, il a fini par fabriquer des guitares. Lag a été créée en 1981, produisant au compte-gouttes, testant tout ce qui pouvait l'être pour améliorer ses instruments. Son cobaye fut la "numéro-un". "Elle est détruite à force de modifications", reconnaît-il. Je ne sais plus très bien quand Lag s'est installé à Bédarieux, c'était dans la première moitié des années 90, probablement en 1993. La marque était alors déjà connue. Des guitaristes réputés jouaient sur ses guitares, comme le guitariste de Mötorhead, Phil Campbell. Lag avait en fait besoin de locaux plus vastes, mieux équipés pour produire davantage afin de répondre à la demande. La petite usine s'était à cette occasion dotée d'une machine à commandes numériques, destinée à produire manches et corps. Une véritable innovation à l'époque.
Michel Chavarria était à l'affût de la moindre nouveauté, tant en matière de lutherie que d'électronique. Ainsi, les modèles des années 90 étaient très proches des premières Valley Arts (époque Lukather, fin des années 80 / début 90), dans leur construction et dans le soin apporté aux finitions. Lag, à cette époque, n'avait cependant pas la capacité de communiquer autant que pouvaient le faire les marques américaines qui étaient, en cela, aidées par des bataillons de célébrités mondiales. Pour ne rien arranger, il n'était pas facile d'imposer une marque française dans un univers imprégné du mythe américain (entretenu par Gibson et Fender), si bien ancré dans la tête des guitaristes. Lag se battait avec le seul moyen dont elle disposait : une production d'une qualité irréprochable. Ce qui lui valait régulièrement d'élogieuses chroniques dans la presse spécialisée françaises. Les Lag Custom, par exemple, sont de fabuleux instruments. Voyez celle que j'ai eu la chance d'avoir entre les mains (le micro aigu et le vibrato n'étaient pas d'origine) :
Et mon actuel Lag : une Rockline Light :
Comme elle a une très belle lutherie, j'ai upgradé son électronique en changeant absolument tout : micros, sélecteur de position, potard, câblage et pose d'un Floyd signé Schaller.
Ces années-là ont été heureuses, mais dures. Lag aurait très certainement mérité de percer davantage. "Pendant vingt ans, ça a été un bonheur, difficile, mais un vrai bonheur", admettait Michel Chavarria en juin 2010, lors d'une rencontre à l'atelier de Bédarieux.
Au cours de sa carrière, Michel Chavarria fut principalement animé par la passion de créer. C'est ainsi qu'il y eut une collaboration fructueuse avec Jean-Michel Jarre (sur des synthés), puis la création d'un préampli à lampes, le Spitfire TL1, fort recherché aujourd'hui. Enfin, au début des années 2000, il entreprit une collaboration avec un monstre sacré de la lutherie française : Roger Jacobacci, dont les guitares sont désormais très recherchées par les collectionneurs (vous pouvez voir l'une des ses beaux instruments sur le post consacré au Marshall Country Club sur ce site). Michel Chavarria et Roger Jacobacci développèrent une gamme de basses ensemble.
Mais, arrêtons-nous sur le preamp TL1. Je le tiens de Michel : il fut en fait développé et conçu par un employé d'Hugues & Kettner. La particularité de cette machine était d'avoir une belle saturation, couplée à un excellent simulateur de HP. Il était, à l'époque, question de produire un TL2 avec Bogner. Il n'a jamais vu le jour sous la marque Lag, mais le projet déboucha sur le preamp The Fish de Bogner. Voilà pour la petite histoire. Michel possède toujours deux TL1. Il produisit même un combo. Un lien sur La Boîte noire, concernant le TL1 :
Finalement, la chance finit par sourire. Lag entra dans le giron d'Algam, le principal distributeur d'instruments de musique en France, et en Europe. C'est ce groupe, notamment son patron, féru de guitares, qui lui donna enfin la dimension international qu'il mérite. Grâce à la complémentarité de Michel Chavarria et Gérard Garnier, le patron en question, qui est toujours à l'écoute de bonnes idées que certains pourraient trouver farfelues. C'est ainsi qu'il proposa de lancer une gamme d'instruments de saison (série automne/hiver/printemps/été), avec couleurs adaptées à chaque, qui devint la série 4 Seasons de Lâg (avec un flex cette fois). Gérard Garnier a également fait le design de la gamme Tramontane qui marche très fort. Et c'est à ce moment que Michel se fait alors appelé Lâg-Chavarria.
Voici les deux derniers articles que j'ai écrits sur Lag dans le journal, Midi Libre ù j'ai travaillé jusqu'en 2015. Ces articles ne sont pas libres de droit, pas plus les textes que les photos qui appartiennent quant à elles à Max Bérullier, un photographe professionnel et patron du service photo du journal, qui a lui aussi quitté le journal mais un peu plus tard que moi. Voici le premier des deux articles, Lag_bruynooghe.pdf et le second, Lag_conquete_monde_mai2012_midi_libre.pdf
Michel a rajouté sur les manches des guitares une croix du Languedoc stylisée. C'est avec cette croix que sont signées les Custom shop faites à Bédarieux (Custom Bédarieux). Michel est très attaché à la région dans laquelle il vit. La photographie est une autre de ses passions. Il est excellent photographe. Peu de gens le savent. Pas mal d'images faites par lui étaient d'ailleurs utilisées dans les communications de Lâg. Un lien où vous découvrirez cet autre talent : https://michelch.deviantart.com/
C'est en 2016 qu'Algam a décidé de transférer Lâg à Nantes en fermant le site de Bédarieux (lire l'interview du patron d'Algam, ici). Michel n'a pas suivi le déménagement. Il a quitté l'entreprise et il ne se consacre plus aujourd'hui qu'à deux de ses passions : jouer de la guitare et la photographie. Il laisse néanmoins derrière lui une jolie production d'instruments faits en France, production qui n'a pas grand-chose à envier aux poids-lourds du marché.
L'auteur de ses lignes en compagnie de Michel en 2012 :
L'auteur de ces lignes jouant sur une Imperator dans l'usine de Bédarieux (photo plus ancienne) :
D'autres images prises dans l'atelier de Bédarieux
La machine à commandes numériques employées dans l'usine de Bédarieux :
L'étape du ponçage des manches :
La lutherie :
La Croix du Languedoc
Lâg utilise aussi des bois... griffés par des ours du Canada pour faire des tables de guitare :
Quelques Lag vues sur le net :
Liens :
Guitar_Part_Lag_Arcane_2007.pdf
Quelques-uns des catalogues de Lag (les années des catalogues ci-dessous correspondent à celles données par La Boîte Noire. Il n'est pas certain qu'elles soient toutes justes (vos précisions seront donc bienvenues) :
13 commentaires
« Billet en cours »
Et bien j'attends la suite...
Une petite réflexion, Pierre...
« Lâg, c’est donc aujourd’hui une production de 28 000 guitares acoustiques et 6 000 guitares électriques. »
Mais combien produites en France, dans les conditions décrites, sur ce nombre total ???
Peanuts, j'imagine, non ?
Puisque seul le haut de gamme est concerné, si j'ai bien compris.
Pour moi, Lâg reste « made in China » (ou Corée, ou Asie, peut importe), comme un très grand nombre de fabriquants de grattes de nos jours, malgré le message que tu veux faire passer dans ton article.
Non ?
Ton avis là-dessus ?
En toute objectivité, hein ! :-)
Fred, sincèrement, je n'ai pas vraiment d'avis sur la question. Pierre
Hello ! excellent article que je découvre un peu tardivement !
Je confirme la qualité exceptionnelle des Custom. J'ai un model Rockline Custom de 1989 façon "Van Halen" qui est fantastique, après un essai à l'époque, j'avais vendu ma Gibson Les Paul que je trouvais fade ... Eh j'ai aussi le préampli Spitfire tl1 !
Souvent on me demande comment je fais pour avoir ce son.
Bien Musicalement !
Visio
Eh bien ! Un guitariste qui joue sur Lag et fait de la MAO sous Linux... Pas le choix, je laisse le lien du site bien apparent. D'autant que tu mets tes anciens morceaux à la disposition des autres. A+ Pierre
J'ai la chance d'en abuser d' une tous les jours ma collection 90 c'est top . Merci à ceux qui ont mis leurs mains généreuses dans le bois les Sperzel les Seymour Jeff Beck et Pearly gate et le jack et le médiator et bien sûr tout mon talent et bientôt le Tee shirt qui va avec . J'ai déjà celui de Fender et Gibson mais j'ai une Lag sans le â !
il ne faut pas se laisser charmer par le marketing, peu de guitares sont fabriquées dans l'atelier de Bédarieux.
La plupart est fabriqué en CHINE.
J'ai acheter hier un T200 ACE alors que j'étais parti pour un T100 ASCE (les cordes frisent malgré réglages de la manche par le vendeur)
Je continue encore aujourd'hui à pleurer toutes les larmes de mon corps tellement la finition est à chie** !!! (caisse pas plate, chevalet non aligné, le logo lag à côté de la rosace fait cheap ), je rigole quand on me dit que la production est chinoise mais le contrôle qualité se fait en France, faut aller vite acheter une paire de lunettes les mecs!.
C'est la 1ere et dernière fois que j'achète LAG
Salut Kirikou. On n'est jamais à l'abri de tomber sur un mauvais numéro. C'est aussi vrai que beaucoup de guitares sont fabriquées en Chine. J'ajoute que sans cela, Lâg aurait sans doute disparu et je préfère que Lâg soit toujours là. Quant à la qualité, j'ai souvent eu de bonnes Lâg entre les mains et je connais la passion qui anime Michel Chavarria. Il appartient à cette race d'hommes honnêtes, qui se donnent entièrement à ce qu'ils aiment. De plus, il surveille de très près la qualité des productions chinoises. Bref, je le défends. Pierre
moi, j'ai une metal master Rocklinede 1991... comme neuve! et pourtant elle a sorti quelques notes depuis...seul le TB4 a laché..je l'ai remplacé par un TB6 histoire de " metaliser un brin plus fort !" toujours pas de regret, cette guitare n"est pas ridicule, j'ai aussi une kramer, une lespaul ,et une music man...la p'tite française n'a pas a rougir!!
Je vous trouve un petit peu durs! Pour moi LAG est une marque prestigieuse, surtout les "Bédarieux", la France peut se glorifier d'avoir des guitare de luthiers qui rivalisent sans pâlir avec les meilleures guitares au monde. J'ai parmi mes amis un très bon guitariste qui a acquit un très belle LAG dont personne ne connait le type, format strato demi-caisse très fine, montée avec des micros HSH, celui du chevalet pouvant donner un son acoustique (piezo) des mécaniques à blocage, un vibrato impeccable, le tout dans une livrée bleu translucide magnifique sur une table en érable ondée AAA.... C'est pour moi la plus belle guitare du monde !!!!!
Bonjour, un peu surpris par cet historique stipulant que l'histoire de Lag débute en 1978; je suis en possession d'une Lag modèle Diva datant et commercialisée en 1977 et que j'ai acheté moi même à l'époque. Elle devait donc être fabriquée bien avant non ?
Bonjour Mickey. Je vais donc me renseigner auprès de Michel Chavarria.
Bonjour Ludo 72. Si j'ai fait un post sur Lâg et Michel Chavarria, son créateur, c'est justement parce que je considère qu'il a fabriqué d'aussi bonnes guitares que les meilleures marques américaines.